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Presse quotidienne d’information : chronique d’une mort annoncée ?

Presse quotidienne d’information : chronique d’une mort annoncée ?

le jour de l'auditionJ'avais eu l'honneur d'être auditionné au Sénat par la Commission des affaires culturelles qui avait créé un groupe de travail sur la crise de la presse. Ce groupe de travail était présidé par Louis de Broissia, Sénateur UMP de la Côte-d'Or et membre de la commission culturelle du Sénat.

rapport broissiaLe rapport vient de sortir, je suis allé à la conférence de presse ce matin.

Voici la notice:

La presse quotidienne d'information politique et générale traverse une période difficile marquée par la désaffection de son lectorat, la baisse continue de ses recettes publicitaires et le maintien de coûts de production élevés. Créé par la commission des affaires culturelles du Sénat le 23 janvier 2007, le groupe de travail sur la crise de la presse a ouvert ses portes à tous les acteurs du secteur afin d'identifier les causes de ce déclin et de faire des propositions concrètes susceptibles d'inverser cette tendance. Au terme de ses travaux, il propose cinq pistes de réflexion tendant à favoriser la reconquête du lectorat, à faciliter la prise en main du produit presse par les jeunes générations, à accélérer l'entrée des entreprises de presse dans l'univers numérique et à conforter le statut des journalistes. Ces pistes prennent des formes variées adaptées à la diversité des enjeux : décisions internes aux entreprises de presse, modifications législatives et évaluation des politiques d'aides publiques. Leur mise en oeuvre rapide permettrait de sortir d'une situation regrettable tant pour le pluralisme de l'information que pour le bon fonctionnement de notre démocratie.

Pendant la conférence de presse, Louis de Broissia a lu en commentant un peu la synthèse (disponible ici) du rapport et à répondu aux questions de l'assistance, finalement assez remontée: le rapport laisse en effet un peu sur sa faim. Il constate, mais ouvre assez peu de perspectives originales. L'internet y est trop peu présent, on y parle de blogs mais peu des sites de presse, aucun mot sur le prix trop bas de la publicité en ligne, rien de tout cela. Un rapport cantonné à la presse papier mais qui ne vas pas chercher assez loin selon moi.

Le rapport est disponible dans son intégralité.

Qu'en avez-vous pensé?

View Comments (7)
  • Cher Gilles Bruno
    C’est peu dire comme vous le faites remarquer que le rapport laisse sur sa faim: il aurait pu sortir, il y a cinq ans ou dans dix ans, si la pqn existe encore, et il proposerait les mêmes solutions.
    En fait, les mesures qui permettraient de sauver la presse française existent mais personne ne veut les prendre: les éditeurs pour fermer le marché à la concurrrence, le pouvoir politique pour maintenir le secteur sous tutelle.
    Si vous permettez d’ouvrir avec vous ce débat, on pourrait en dénombrer trois.
    1) l’obtention d’un plan social des imprimeries devrait être accordé en échange de la fin du bureau de placement et du monopole syndical. D’un coût de 40 millions d’euros, celui qui a été accepté le mois dernier par l’Etat prévoit de faire partir les ouvriers du Livre à 50 ans sans contrepartie.
    2)Le départ des quotidiens des NMPP. Une nouvelle coopérative qui recevra la subvention de 12 millions d’euros de l’Etat sera chargée de les distribuer.
    Lagardère qui ne sera plus victime d’un procès d’intention pourra se consacrer à la distribution des seuls magazines et recherchera la rentabilité.
    Aujourd’hui, le coût des invendus est tel (70% du prix facial au dessus de 21% des invendus) que Le Figaro ou Le Monde desservent 19 000 points de vente sur les 29 000 disponibles.
    3)Mettre fin à la fiscalité des aides qui bénéficient à l’AFP, la Poste et les imprimeries. Les journaux ne les voient pas. S’inspirer du modèle du cinéma et demander à tous les acteurs économiques dont le développement se fait au détriment de la presse – audiovisuel, grande distribution, fournisseurs d’accès, moteurs de recherche- de participer à sa survie.
    Avec des coûts d’impression comme de distribution allégés, des ressources complémentaires, la presse pourra enfin améliorer son contenu tout en revalorisant la profession de journaliste.
    Pardonnez-moi cette intervention un peu longue, mais il y a quelque chose de rageant à voir le même constat dressé et les mêmes tabous survivre.
    Bien amicalement
    Emmanuel Schwartzenberg

  • Bonjour,

    Dommage Bruno que vous n’ayez pas fait une brillante synthèse en quelques points de ce rapport. Ca nous aurait permis de le commenter sans avoir à le lire.

    En ce qui concerne le net et l’info, il faudrait faciliter le moyen de faire payer les gens sur le net. Une taxe globale sur les FAI me semble complexe. Juste rendre le paiement plus fluide. Schneiderman arrive bien à accumuler 20 000 abonnés avec son émission. Après tout, le payant a peut-être de l’avenir sur Internet. Une petite idée en passant pour nos amis de la presse écrite d’info : arrêtez de mettre vos journaux en ligne gratuitement sur le net, peut être que les gens continuerons à vous acheter, ou serait même prêt à payer un abonnement sur le net. Non ? Le Monde aujourd’hui, je le lis sur le net.

    Pour répondre à Schwartzenberg, qui jadis travailla au Figaro dont le propriétaire (Hersant père) s’entendait très bien avec le Livre, demander à des entreprises de toutes sortes de participer à la « survie » de la presse a un côté oeuvre de charité voire acharnement thérapeutique fort peu libéral dans cette période où il est de bon ton de l’être. Perfusion, sébille, décidément, la droite n’est plus ce qu’elle était… Et puis virer des gens à 50 ans, ça risque de ne pas plaire à Sarkozy qui est pour les travail des vieux et contre les régimes spéciaux.

    Si les gens préfèrent s’informer sur le net, après tout, pourquoi continuer à subventionner du papier ? Si on commence comme ça, la télé va bientôt demander à Internet d’assurer sa survie parce que les gens regardent plus Internet que la télé (c’est déjà le cas aux US et chez les jeunes en France).

    Quant au fameux syndicat du Livre, il a bon dos. Le problème de la presse écrite ne se limite pas aux coûts de fabrication, loin de là. Pourquoi toujours commencer par là ? Parce que c’est le plus facile ? Parce que les régimes spéciaux sont impopulaires ? Le problème essentiel de la presse écrite d’information, c’est que les ventes baissent, que les gens n’achètent plus.

    Avant de faire des économies et de s’attaquer aux méchants ouvriers du Livre et à leurs régimes spéciaux, je propose que les journaux augmentent leur recettes et en particulier, leur recettes de ventes au numéro. Pour cela, il faut augmenter considérablement le nombre des points de vente. Il n’y a pas de mystère.

    Je propose donc nationaliser les NMPP (ou faire un contrat Etat-Messagerie avec un opérateur privé), et multiplier par trois les points de vente de la presse d’information dans les zones urbaines et créer des points de ventes dans toutes les zones rurales.

    Où trouver l’argent ? Je propose que l’Etat reprenne les NMPP à Lagardère en dédommagement de l’argent qu’il a perdu en achetant ses actions EADS. Il peut même demander à Lagardère un financement complémentaire pour le lancement de cette opération compte tenu de la plus-value qu’il a fait au passage. Voilà une pénitence qui sera utile à la collectivité.

    Le financement de l’Etat pourrait également provenir de la supression de toutes subventions, aides et autres régimes spéciaux de la presse, comme le propose Schwartzenberg.

    Après, il s’agira de faire des bons journaux, ce qui est beaucoup plus compliqué de faire des plans sociaux. J’espère que c’est la première conclusion du rapport !

    JR

  • Un rapport très mauvais selon moi :

    L’analyse n’apporte rien, c’est une simple relecture des travaux précédents. L’auteur et son équipe s’est contentée de lire la littérature déjà existante, de rencontrer une vingtaine de personnes, et de pondre ce rapport d’à peine cinquante pages en … plus de six mois !

    D’ailleurs je parle d’analyse, mais en y regardant de plus près, ce rapport dresse plutôt un constat dans ses deux premières parties : les ventes sont en baisse… et la publicité ne fait pas rentrer assez d’argent… et le syndicat du Livre coute horriblement cher… et les français ne veulent plus lire de quotidiens… mais regardez les Allemands et les Japonais, eux ils lisent encore la presse… oui mais les prix français sont trop élevés…

    Les « propositions de la commission » sont ridicules, totalement déconnectées de la réalité économique, à se demander si le sénateur à relu son propre rapport avant de le donner à ses camarades.

    Tout d’abord, il n’y a aucune proposition pour « casser » ce syndicat du Livre. A l’heure où l’on remet en cause les régimes spéciaux, le sénateur n’a pas eu la présence d’esprit (ou le courage politique) d’inscrire une proposition pour limiter le pouvoir de nuisance des imprimeurs. Avec des couts d’impression aussi élevé, pas étonnant que la rentabilité des titres soit difficile à atteindre !

    Proposition « redéfinition du produit de presse » : bien sur, évidemment, laissons les politiques choisir quelle presse est sérieuse. Laissons les choisir qui bénéficiera des aides, et qui n’en profitera pas.

    Proposition « mise en place d’une période probatoire » : la aussi, c’est évident. Si on veut casser l’innovation éditoriale, alors mettons en place cette proposition.

    Propositions « stratégie globale de diffusion » : bin voyons, laissons décider l’Etat, les groupes de presse, ou les diffuseurs (il n’est pas clair la dessus) quelles régions pourront bénéficier de tel ou tel type de presse.

    Proposition « modification de la loi Bichet » : aménager le principe une entreprise, une voix : pourquoi pas. Mais restreindre son champ aux titres d’information politique et générale, voila qui est encore potentiellement antidémocratique.

    Proposition « aide au portage » : « la commission estime nécessaire de reformer l’aide publique au portage afin de donner un second souffle à un dispositif qui semble péricliter » (je cite). Et moi j’estime nécessaire de réduire la faim dans le monde… On est bien avancé avec cette « proposition » : est ce qu’on pourrait avoir le début d’une esquisse d’une idée, d’une piste de réflexion, pour reformer cette aide ?

    Propositions « séduire le lecteur » : mais ou est on ? Le politique a-t-il vraiment pour rôle de faire le boulot des médias, à savoir comment relancer le marché ?

    – créer un Médiamétrie de la presse : la presse a-t-elle vraiment besoin de l’Etat pour faire ca ? Elle ne peut pas se débrouiller seule ?

    – renouveler l’offre éditoriale : même commentaire. La presse a le droit de faire du contenu élitiste, elle a le droit de mettre les mauvaises nouvelles en une, elle a le droit d’être impersonnelle. Ce n’est pas à l’Etat (ni à un sénateur) de proposer du contenu éditorial ni de donner des conseils.

    Propositions « sensibiliser les jeunes générations » : j’aime beaucoup son « cette situation est peut être liée à la faiblesse des opérations menées par les éditeurs et les pouvoirs publics pour sensibiliser les jeunes… » Ce sénateur est il au courant que nous, « les jeunes » bénéficions déjà de tarifs préférentiels avec l’OFUP ? L’abonnement au Monde par exemple, propose une belle réduction de 58% si ma mémoire est bonne. Que faut-il faire de plus pour séduire « le jeune » ? Pourquoi ne pas lui offrir un bon de réduction Mc Donald à chaque achat de Libé ? Ou un Iphone pour tout abonnement au Figaro ?

    – libre accès des quotidiens au collège : oui oui, comme ca après sa partie de Pokémon et avant de fumer sa première clope, le « jeune » pourra lire un peu son quotidien favori.

    – financer un abonnement individuel entrant en seconde : voila une proposition intéressante, même si je pense que le « jeune » en seconde n’a pas la maturité pour lire un quotidien.

    – installer des points de vente dans les lycées : soulève un nombre incroyable de questions : quels titres seront disponibles ? L’Auto Journal sera-t-il disponible ? qui tiendra ces stands ? combien de fonctionnaires faudra t il embaucher ? les « jeunes » trouvent le temps pour sortir du lycée acheter des cigarettes, ils peuvent aussi en profiter pour acheter un journal et pourtant ne le font pas…

    Propositions « favoriser l’entrée des quotidiens dans l’univers numérique » : je me suis renseigné sur l’auteur du rapport, avec mon ami Google. Il a dirigé un journal, fait partie de la Socpresse, et dirige une commission sur les médias… bref, il devrait être un minimum au courant de ce qui se fait en ce moment.

    – favoriser la constitution de groupes pluri médias : quand on voit comment ca ce passe en ce moment, on se demande si cette proposition figure bien dans le rapport : multiplication des problèmes entre Lagardère et ses diverses publications, idem pour Dassault, idem pour Bouygues Télévision, risque de conflit d’intérêt entre Les Echos / La Tribune / LVMH… Mais ya qu’a, ya qu’a faire ca, comme cela on aura d’importantes économies d’échelle, et une belle standardisation éditoriale en bonus.

    – droits d’auteurs : pas d’objection.

    Juste une remarque en passant, pour en finir avec cette partie sur l’univers numérique: sur le site du Monde, il y a dans l’édition d’aujourd’hui un article sur des clients de prostitués qui se sont retrouvés filmés par des riverains mécontents, puis ces films ont été mis à disposition sur Internet… Le Monde proposait la vidéo directement depuis YouTube : pas un simple lien, mais la vidéo elle même, directement sur son propre site… Je crois que, si le Monde fait ca (le « quotidien de référence »), c’est bien la preuve que les quotidiens sont entrés dans l’univers numérique, non ?

    Propositions « conforter le statut des journalistes » : pas d’objection.

    Conclusion :

    Un rapport de plus (le prochain est pour fin 2008 – début 2009, c’est ca ?).

    Un rapport copié collé en ce qui concerne la partie « analyse ».

    Des propositions sans originalité, déjà vues. Plus inquiétant, certaines sont potentiellement antidémocratiques.

    Un sénateur UMP : je trouve rassurant que, même de droite, les hommes politiques n’ont aucune notion de la réalité économique. Quand une entreprise va mal, on cherche d’abord à réduire les couts (le syndicat du Livre par exemple !). Je trouve rassurant que, même de droite, les seules réponses des hommes politiques soient « subventions » « subventions ». Ne réglons surtout pas les problèmes structurels, attaquons nous aux problèmes conjoncturels (mais pas trop quand même).

    Bref, en tant que « jeune », ce rapport ne m’a rien appris. J’ai perdu une petite heure à le lire, et deux bonnes heures à rédiger ce commentaire au lieu de bosser à mon propre mémoire. J’ai un peu de mal à donner le mot de la fin, tant ce rapport me fait réfléchir (sur ma condition de futur contribuable qui devra payer les retraites des syndicalistes du Livre parce que personne n’a eu le courage de les affronter, sur le fait qu’un sénateur perde son temps et notre argent pour rédiger un énième rapport, qu’il rende un rapport aussi « qualititatif »). Le mot de la fin donc, allez en paix et laisser moi dormir.

    Bonne nuit.

    AJ.

  • 2 remarques :
    1 la baisse des ventes est le reflet d’une crise de l’offre pas de la demande cqfd augmenter le nombre de points de ventes ne servira à rien si ce n’est fragiliser les points existants et augmenter les taux d’invendus…la preuve la PQN est déjà absente de 100% du réseau actuel.
    2 le portage par les « vendeurs colporteurs de presse » est organisé par un statut qui date de l’après guerre. Avant de changer les aides il est plus simple de nettoyer ce statut. A quand les lyceens porteurs comme aux US ?

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