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€40m pour éviter le changement

€40m pour éviter le changement

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Rien ne vient perturber La Provence – pour le moment.

On l’annonçait il y a quelques semaines : Lagardère vient de céder ses opérations dans la presse régionale au Groupe Hersant Média pour 160m d'euros. Le Monde devrait suivre d'ici peu avec les Journaux du Midi pour € 100m.

Quelques jours avant d'entrer en négociations exclusives avec Hersant, les deux groupes avaient refusé une offre de Mecom à € 300m. Un article des Echos soulignait fin juillet que le prix n'était pas le seul facteur pris en compte et que des "aspects sociaux et politiques pourraient peser". Ils pèsent même € 40m.

Les aspects sociaux en question ne sont qu'un euphémisme pour évoquer la menace de grève des salariés en cas de discussions avec le groupe Mecom. David Montgomery, son président, n'apparaît pas comme le patron idéal. Une journaliste du FAZ le décrit comme un manager froid et obsédé par l'argent.

Le site du groupe ne cache pas sa stratégie : "to enhance shareholder value through the adoption of industry best practices, investment in new technologies, revenue enhancing initiatives and cost efficiencies". Traduction: faire des sous.

Mecom a beau être le groupe le plus détesté d'Europe, il a le mérite de mettre fin à la sclérose en place là où il investi. Il vise une rentabilité opérationnelle de 15% partout, ce qui passe par des réductions d'effectifs, mais aussi par de vrais investissements sur le web. Il a ainsi racheté netzeitung.de, le premier pure-player d'information générale, afin de lui donner une stature nationale. Hersant, de son côté, n'a pas encore de site corporate.

L'ensemble des journaux cédés par Lagardère a réalisé à peine plus de € 220m de revenus en 2006 et € 3m de ce que le service presse appelle joliment le résultat courant des opérations (le résultat opérationnel ?), sans doute la dernière ligne positive du compte de résultat. En gros, ces journaux ont besoin d'un sérieux plan de relance pour sortir du rouge.

Plutôt que d'utiliser une partie des 40 millions supplémentaires pour convaincre les salariés d'accepter l'offre de Mecom, Lagardère a choisi la facilité en cédant ses titres à Hersant, le candidat le moins effrayant mais aussi le moins préparé.

Cette transaction vient confirmer la stratégie financière originale des médias français, qui préfèrent souvent se voir comme des extensions d'empires familiaux plutôt que comme des centres de profit.

View Comments (4)
  • Thibault,

    Il est fort possible que la PQR soit plus rentable que la PQN, grace notamment a leur monopoles par région. Ici, la rentabilité opérationnelle est de 1.35%, soit plus que les grands quotidiens nationaux je pense.

    Malgré la plus faible concurrence, la presse locale rencontre les mêmes problèmes que la presse nationale. Pour les journaux de Lagardere, la diffusion 05-06 chute de 3.3% dans un marche publicitaire qui stagne, voire, dans le Sud, qui se contracte.

    S’ils ne veulent pas disparaître avec la generation pre-baby boomers (leur lectorat actuel, en gros), les journaux de la PQR devront aussi se réinventer, au dela du passage en format berlinois. En appliquant les méthodes de Mecom, par exemple.

  • Tout à fait d’accord avec le commentaire précédent. Quelques questions ? Et si l’offre de Mecom n’était qu’un leurre destiné à mieux faire passer l’inévitable plan de restructuration ? Et quel est l’endettement des titres rachetés ? Il faut faire attention au prix facial de rachat qui n’a pas forcément de lien avec l’argent finalement déboursé.

  • Rosselin,

    L’offre de Mecom n’était pas un leurre. Montgomery veut s’implanter dans la PQR française depuis longtemps. Il avait voulu acquérir le Dauphine Libere et le Progrès il y a quelques années.

    Par ailleurs, je pense que la transaction, concernant le groupe Le Monde en tout cas, se fait en cash. Le Monde vend uniquement pour éponger sa dette.

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